Soutenances de thèse

Quelle valeur pour l'échange ? La comptabilité C.A.R.E. pour définir un juste prix écologique à travers le double-affichage des coûts des produits agricoles

27/11/2025 à 14h00

M. Louis DUMEAUX présente ses travaux en soutenance le 27/11/2025 à 14h00

À l'adresse suivante : Université Paris Dauphine-PSL, Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75016 Paris. Salle des thèses - D520

En vue de l'obtention du diplôme : Doctorat en Management

La soutenance est publique

Titre des travaux

Quelle valeur pour l'échange ? La comptabilité C.A.R.E. pour définir un juste prix écologique à travers le double-affichage des coûts des produits agricoles

École doctorale

École doctorale Dauphine SDOSE

Équipe de recherche

UMR 7088 - Dauphine Recherches en Management

Section CNU

7 - Sciences de la société

Directeur(s)

Frédérique DEJEAN

Membres du jury

Nom Qualité Établissement Rôle
Mme Frédérique DEJEAN Professeur des universités UNIVERSITE PARIS DAUPHINE - PSL Directeur de these
M. Didier BENSADON Professeur des universités IAE Lyon School of Management Rapporteur
M. Nicolas ANTHEAUME Professeur des universités IAE Nantes - Économie et Management Rapporteur
M. Alexandre RAMBAUD Maître de conférences AgroParisTech-CIRED CoDirecteur de these
Mme Céline BAUD Professeur des universités Université Paris-Dauphine PSL Examinateur
Mme Yulia ALTUKHOVA-NYS Maître de conférences Université de Reims-Champagne Ardennes Examinateur
M. Frédéric ZAHM ingénieur de l'agriculture et de l'environnement Hors classe Inrae - laboratoire ETTIS Examinateur

Résumé

Le monde agricole traverse une crise écologique aux formes multiples : environnementale, sociétale, humaine et économique, aux impacts globaux (Stanziani, 2021 ; Valiorgue, 2020). Cette thèse expérimente le cadre de la comptabilité écologique pour construire un modèle agricole soutenable. Loin d'une approche techniciste de la comptabilité et consultative de la recherche (Cappelletti, 2010), elle explore des notions d'économie morale telles que le juste prix ou le double-affichage des coûts. Elle éclaire tensions, controverses et injonctions contradictoires dans un secteur en mutations (Hervieu et Purseigle, 2022).

Nous adoptons une posture critique en revendiquant un juste-prix écologique comme outil d'accountability (Atkins & Maroun, 2018). Il s'appuie sur une comptabilité de gestion écologique (Antheaume, 2013) via le cadre de C.A.R.E., qui permet de rendre visibles les coûts de préservation des capitaux humains et naturels. Ceux-ci ne sont plus des actifs financiers, mais des entités autonomes devant être préservées (Rambaud, 2022).

Dans une première partie, la thèse mobilise C.A.R.E. pour analyser les limites des dispositifs actuels d'affichage socio-environnemental, et d'évaluation des coûts sociétaux, majoritairement fondés sur une logique néoclassique (Pigneur, 2019). Ces outils, bien qu'utiles, sont souvent réducteurs au détriment de la complexité des interdépendances écologiques et sociales qui fondent notre existence (Jourdaine, 2020 ; Pradel, 2011). Cette critique s'étend aux théories de la valeur et du prix : d'une séparation classique des valeurs (d'usage, legs, existence) à l'approche critique de Kapp (2015). Le juste-prix écologique défendu ici s'en distingue par une préservation au coût réel plutôt que par la valorisation. Il s'inspire de Dembinski (2004) : un prix qui garantit une existence digne à chaque partie de l'échange.

Dans une seconde partie, nous décrivons la méthodologie qui repose sur deux recherche-intervention (David, 2012) : un projet de double-affichage des coûts avec une productrice du groupe Carrefour et un projet territorial sur les coûts de préservation en élevage laitier avec la FNCUMA. Ces terrains sont enrichis par des entretiens auprès d'agriculteurs intégrés en filières longues, révélant certaines tensions autour de la construction du prix de revient et de leur rejet par les logiques de marché.

La troisième et dernière partie est consacrée aux résultats de terrain montrent la faisabilité d'une comptabilité de gestion écologique C.A.R.E. mais également certaines limites dont la complexité, les désaccords sur la valeur des activités de préservation et leur classification. Les témoignages agricoles révèlent des espoirs et mais également des doutes sur la viabilité de la comptabilité écologique dans un contexte global incertain.

Le cadre C.A.R.E. permet d'intégrer les activités de préservation aux coûts de revient. Le double-affichage valorise ce juste-prix écologique, fondé sur les coûts réels subis par les agriculteurs et non sur les prix imposés par le marché global (Ansaloni & Smith, 2021 ; Guillotreau, 2013 ; Rastoin, 2022). Cela repositionne l'agriculteur comme acteur du prix, et resitue la comptabilité comme un outil politique. La thèse s'inscrit dans une sociologie critique de la comptabilité : loin d'être neutre (Richard, Bensadon, Rambaud, 2018), elle participe à la construction des rapports de force. Elle propose un changement de paradigme : passer d'une comptabilité de la performance à une comptabilité de la préservation, en replaçant l'agriculture dans une éthique du soin envers les humains et non-humains.

Enfin, ce travail ouvre des perspectives politiques pour refonder les prix agricoles, articulant reconnaissance sociale, viabilité économique et soutenabilité écologique. Il invite à repenser la place de l'agriculture dans nos sociétés et le rôle de la comptabilité dans la transition.

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