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Dossier | Dauphine Digital Days 2022 "IA & société" - Les actes #1

Réglementation des BigTechs : le contexte américain

Publié dans IA & Numérique 2 mn - Le 23 novembre 2023

William Kovacic, professeur de droit à la George Washington University (États-Unis) appelle à une réaction américaine pour réguler le numérique, comme le font les pays de l’Union Européenne. Une opération délicate, dans un pays largement clivé.

William Kovacic, professeur de droit à la George Washington University (États-Unis)

Ce n’est pas une exagération de le dire : quand il s’agit de régulation du numérique, les États-Unis doivent absolument rattraper le retard par rapport à l’Europe. 

Un paradoxe américain

Aux États-Unis, nous vivons un paradoxe tout américain, quand il s’agit des Big Techs : que ce soit la droite ou la gauche, aujourd’hui, tout le monde les déteste. Et cela alors qu’il y a seulement dix ans, ils étaient encore traités comme des rock-stars. La question la plus difficile qui leur était adressée était « Comment êtes-vous devenu aussi fantastiques, et quels miracles allez-vous faire l’an prochain ? » 

Désormais, cela a bien changé ! La preuve avec l’audition au Congrès du président d’Alphabet, Sundar Pichai, qui a été traité avec bien moins d’égards. Et avec des interrogations beaucoup moins amicales d’entrée de jeu.

Dans ce contexte de défiance, les élections récentes aux États-Unis ne devraient pas faciliter les tentatives de régulation, tant le Congrès est désormais divisé. Ce clivage va compliquer les choses. Cependant, un espoir réside sur la Californie, qui réfléchit à mettre en place des mesures similaires à celles du DSA (Digital Services Act). 

Cela n’est pas anodin : toutes les grandes entreprises tech sont basées dans cet État, elles devront donc suivre les règles californiennes. Un tel règlement, même simplement local, pourrait donc avoir un impact sur l’ensemble du pays. Tout cela pourrait aussi participer à générer des tensions entre la Californie et le gouvernement…

Terrain glissant

L’autre bonne nouvelle est que la FTC (Federal Trade Commission, l’agence de la concurrence aux États-Unis, NDR), se montre proactive sur le sujet. Elle a ainsi visé le groupe Meta récemment, estimant que les acquisitions de WhatsApp et d’Instagram étaient anticoncurrentielles.

Le problème avec ce type de démarche est que ces secteurs se transforment, et vite. Et ces procès peuvent s’étaler sur des années. Celui de Meta ne devrait pas démarrer avant 2024. Or, depuis le début de l’année 2022, l’action du groupe a perdu 70 % de sa valeur. Il n’est pas certain que l’entreprise survive jusqu’à ses vingt ans. 

Quand je questionne mes élèves sur leurs usages, très peu utilisent Facebook, si ce n’est pour organiser les fêtes familiales avec leurs parents. Résultat : Meta pourrait n’être plus qu’une ombre de ce qu’elle est à la fin de ce procès…

Il appartient désormais aux pays du monde d’échanger entre eux. Et de tenter de formuler, même si cela est difficile, une vision commune sur ces problématiques.